Travailler tout en percevant sa pension de retraite, c’est possible. Pour certains retraités, c’est même indispensable afin de maintenir leur niveau de vie. Mais le montant des revenus est plafonné et le cumul emploi-retraite dépend aussi, en partie, de l’âge des bénéficiaires depuis la réforme des retraites de 2023. Voici notre guide pour tout comprendre au dispositif du cumul emploi-retraite.
Le cumul emploi-retraite est un dispositif assez ancien. Créé en 1945, il a depuis été modifié à plusieurs reprises, notamment avec les réformes des retraites de 2003, de 2014, et plus récemment celle de 2023. L’an dernier, ce dispositif a ainsi été revu avec la mise en place de nouveaux droits pour les personnes cumulant un emploi et retraite…
Astuce : Bientôt à la retraite ? Le site Info-retraite propose un « Parcours cumul emploi-retraite ». Vous serez alors informé sur les règles à respecter, en fonction de votre situation.
Selon les chiffres de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)(1), la France compte 17 millions de retraités. Tous régimes confondus, leur pension moyenne de retraite s’établit à 1 531 euros bruts mensuels, soit 1 420 euros nets mensuels.
Cela peut expliquer la reprise d’un emploi après l’âge légal du départ à la retraite pour un certain nombre d’entre eux. Précisément, ils sont 453 500 Français de plus de 65 ans à avoir été en emploi en 2021, selon l’Insee (2). À l’époque, l’Institut identifiait trois profils types de « cumulants » :
Ces différentes données datent d’avant la réforme des retraites de 2023 et des modifications apportées au dispositif du cumul emploi-retraite. Depuis, ce système est plus intéressant en permettant l’acquisition de nouveaux droits à la retraite. Dans tous les cas, le report de l’âge légal du départ à la retraite et les difficultés à obtenir une carrière complète devraient inciter davantage de Français à bénéficier de ce dispositif.
Les professions libérales (avocat, expert-comptable, huissier de justice), les dirigeants et anciens salariés peuvent choisir, une fois à la retraite, de reprendre ou de poursuivre une activité professionnelle. Ils bénéficient alors du dispositif du cumul emploi-retraite.
Le cumul emploi-retraite permet de percevoir l’intégralité de sa pension de retraite ou, selon sa situation, seulement une partie, en plus de ses revenus d’activité. On parle alors du :
À connaître : le site Service-public.fr met à disposition un simulateur pour estimer le revenu cumulable avec votre pension de retraite dans le cas où vous souhaitez travailler à la retraite.
Ces deux dispositifs permettent de combiner emploi et retraite mais ils sont bien différents.
Dans le cas de la retraite progressive, vous poursuivez une activité à temps partiel, comprise entre 40 et 80% d’un temps complet, après avoir liquidé une fraction de votre pension de retraite. Vous percevez une partie de vos retraites de base et complémentaires. Pendant votre période de travail, vous continuez à cotiser pour votre retraite. Durant la retraite progressive, la durée de cotisation est prise en compte au moment de la liquidation définitive de votre pension. Pour bénéficier de ce dispositif, vous devez avoir atteint au minimum 60 ans et justifier de 150 trimestres, tous régimes de retraite confondus. Vous pouvez le demander seulement 2 ans avant l’âge minimum légal de départ en retraite. Ici il s’agit avant tout d’un aménagement du temps de travail.
Depuis 2018, vous pouvez accéder à la retraite progressive même si vous avez plusieurs employeurs.
Avec le cumul emploi-retraite, vous avez liquidé tous vos droits à la retraite. C’est donc un travail rémunéré après être devenu retraité.
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Plusieurs conditions sont à remplir pour percevoir l’intégralité de sa pension de retraite et de ses revenus d’activité :
Le cumul emploi-retraite intégral (CER intégral), aussi appelé libéralisé ou déplafonné, permet de toucher l’intégralité de sa pension de retraite et de ses nouveaux revenus d’activité. Depuis la réforme des retraites de 2023, vous pouvez aussi désormais acquérir de nouveaux droits à la retraite et des points de retraite complémentaire Agirc-Arrco . Ainsi, vous liquiderez une seconde pension de retraite au moment d’arrêter de travailler.
Retenez que si vous poursuivez une activité chez votre ancien employeur, les nouveaux droits à une pension de retraite sont calculés après un délai de carence de 6 mois, à compter de la liquidation de la première retraite. Ce délai de 6 mois ne s’applique pas si vous avez été admis à la retraite avant le 15 octobre 2023.
Exemple de cumul emploi-retraite 2024 intégral
Christine est née en 1961. Elle a validé tous ses trimestres de retraite (169 dans son cas) et elle est partie à la retraite au 1er janvier 2024, à 62 ans et 3 mois. Pour ne pas perdre en pouvoir d’achat, Christine a décidé de reprendre son travail chez son ancien employeur. Il lui a proposé un mi-temps, payé 1 200 euros bruts mensuel. En tout, elle perçoit donc 3 000 euros bruts par mois. |
La récente réforme des retraites a rendu le dispositif du cumul emploi-retraite plus intéressant en permettant l’acquisition de nouveaux droits à la retraite. Ces droits ne modifient pas le montant de la retraite que vous touchez. Concrètement, depuis le 1er janvier 2023, vos activités professionnelles à la retraite donnent droit à une nouvelle pension de retraite. Le montant de la seconde pension ne peut dépasser 5 % du plafond annuel de la Sécurité sociale (Pass), fixé en 2024 à 2 318,40 euros bruts par an ou encore 193 euros bruts par mois.
À compter du 1er janvier 2025, les retraités en situation de cumul emploi-retraite intégral relevant du régime complémentaire des indépendants (RCI) acquerront des points au titre de leur régime de retraite complémentaire. |
La seconde pension bénéficie automatiquement du taux plein. Logique : son montant n’est pas réduit en fonction du nombre de trimestres d’assurance retraite manquants. Elle ne donne pas lieu à majoration. Une fois cette deuxième pension liquidée, il ne sera pas possible d’acquérir de nouveaux droits à retraite même en cas d’une nouvelle reprise d’activité.
Le calcul de la pension n’est pas fait sur le nombre d’heures travaillées mais sur le montant de la rémunération.
À savoir :
La nouvelle pension de retraite est calculée en fonction des règles du régime général de retraite auquel est affilié l’assuré. Le revenu servant de base de calcul est le salaire moyen correspondant aux cotisations permettant la validation d’au moins un trimestre de retraite. Un trimestre est acquis si vos revenus atteignent 150 fois le Smic horaire brut.
Le site Service-public.fr met à disposition un formulaire type pour faire votre demande d’une deuxième pension de retraite. Plusieurs justificatifs sont à fournir avant de l’envoyer :
Avant d’entrer en cumul emploi-retraite, l’assuré doit demander la liquidation de toutes ses pensions de retraite obligatoires. Il lui faut ensuite prévenir, par écrit, ses caisses de retraite d’une reprise d’activité professionnelle et déclarer sa situation, également par écrit, à la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat).
Dans le mois suivant, il faut alors fournir plusieurs informations :
Vous devez également joindre une attestation sur l’honneur listant les différentes caisses de retraite, de base et complémentaires, vous versant votre pension de retraite. Sur cette attestation, vous certifiez également avoir demandé toutes les pensions de retraite de base et complémentaires auxquelles vous avez droit.
Vous pouvez reprendre certaines activités professionnelles et cumuler votre retraite et vos revenus d’activité, sous certaines conditions, dans le cas où vous n’avez pas droit à une retraite à taux plein. C’est le cumul emploi-retraite dit plafonné.
Ce dispositif permet de percevoir un complément de revenus mais, contrairement au cumul intégral, les retraités cotisent à fonds perdu. Le cumul plafonné ne leur permet pas d’ouvrir de nouveaux droits à retraite et de percevoir, ensuite, une deuxième pension de retraite.
Il existe plusieurs activités cumulables avec votre retraite même si vous ne remplissez pas toutes les conditions du cumul intégral. Le site Service-public.fr les recense toutes et détaille les modalités propres à chacune. En voici quelques-unes :
Contrairement au cumul emploi-retraite intégral, le cumul partiel ne permet pas de reprendre immédiatement une activité chez votre ancien employeur. Vous devrez attendre au minimum une durée de six mois après votre départ à la retraite. Si ce délai n’est pas respecté, le paiement de la pension est suspendu jusqu’à la fin du délai de carence ou la fin de l’activité professionnelle. Cette condition ne s’applique pas si vous changez d’employeur. Vous pouvez reprendre une activité auprès d’un nouvel employeur sans attendre le délai de six mois.
Les modalités d’application du cumul plafonné varient d’un régime de retraite à l’autre. Toutefois pour les retraités du régime général (régime de base des salariés du privé), du régime des salariés agricoles et ceux d’un des régimes spéciaux, la règle du plafonnement est la même.
Deux modes de calcul sont applicables. Le montant le plus intéressant pour le bénéficiaire est appliqué. Ainsi, la somme de vos revenus d’activité et de vos pensions de retraite doit être inférieure à :
En cas de dépassement du plafond, la pension de retraite de base du régime général est automatiquement réduite jusqu’à atteindre le plafond de 2 827,07 euros. Lorsque l’excédent est supérieur au montant de la pension, celle-ci est suspendue en totalité.
À savoir : Depuis la réforme des retraites de 2023, une suspension du plafond est prévue en cas de « circonstances exceptionnelles nécessitant, en urgence, la poursuite ou la reprise d’activité par des assurés susceptibles de les exercer » (Art. L. 161-22-1-4). Elle ne peut excéder un an et est renouvelable 6 mois maximum. Cette disposition avait été prise dans le cadre de la crise sanitaire de la Covid-19.
Exemple de calcul du cumul-emploi retraite plafonné :
Charles, 62 ans, touche une pension de 1 500 euros bruts par mois du régime de retraite de base et 900 euros de retraite complémentaire. Soit, au total, une retraite de 2 400 euros bruts. Ses trois derniers bulletins de salaire s’élèvent eux aussi à 2 400 euros bruts. Dans son cas, le mode de calcul de 160 % du Smic est le plus avantageux. Il lui permet de toucher jusqu’à 2 827 euros bruts mensuels. Pour rester en deçà du plafond de cumul emploi et retraite, il peut percevoir une rémunération allant jusqu’à 427 euros bruts (2 827 – 2 400). Si Charles travaille à temps partiel, rémunéré 1 000 euros bruts par mois, l’excédent sera déduit de sa pension de retraite. Il faut alors prendre en compte l’intégralité de ses revenus , à savoir : 2 400 euros de pension + 1 000 euros de revenus d’activités – le plafond autorisé de 2 827 euros = 573 euros en moins sur sa pension de retraite. Quand Charles pourra-t-il passer au cumul emploi-retraite intégral ? Une fois arrivé à l’âge légal de la retraite à taux plein, c’est-à-dire à 67 ans depuis la réforme de 2023, Charles pourra cumuler sa pension de retraite et ses revenus d’activité intégralement. Il lui faudra donc attendre cinq années avant de percevoir mensuellement 3 400 euros bruts. |
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Dans le mois suivant votre reprise d’activité, vous devez déclarer votre nouvelle situation à la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat). Plusieurs justificatifs sont à fournir :
Les indépendants et les professions libérales peuvent bénéficier du dispositif du cumul emploi-retraite comme les salariés du secteur privé et public.
Les TNS peuvent cumuler leur pension de retraite et leurs revenus d’activité professionnelle s’ils remplissent les conditions d’ouverture des droits à une retraite à taux plein :
Comme pour les salariés, les TNS entrent dans le dispositif du cumul emploi-retraite plafonné s’ils ne remplissent pas les conditions du cumul intégral, ou libéralisé. Les plafonds diffèrent de ceux des salariés. Ils sont différents pour les artisans, commerçants et industriels et les professionnels libéraux.
À noter : les indépendants et professions libérales ne sont pas concernés par le délai de carence de six mois à respecter pour reprendre leur activité, contrairement aux salariés. Ils peuvent ainsi liquider leurs droits à la retraite et poursuivre leur activité professionnelle.
Les revenus d’activité et les pensions de retraite des artisans, commerçants et industriels ne doivent pas dépasser en 2024 :
Le plafond pour les professionnels libéraux retraités affiliés au régime de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (Cnavpl) est fixé à 46 368 euros.
Artisans ou libéraux, si la somme des revenus professionnels et des pensions de retraite dépasse les plafonds, les pensions de retraite diminuent jusqu’à atteindre le niveau du plafond.
Selon le décret du 10 août 2023, pour calculer la deuxième pension des indépendants et libéraux, il faut prendre en compte le revenu annuel de l’année durant laquelle la seconde pension prend effet.
Comme pour les salariés, la nouvelle retraite est calculée à taux plein, sans majoration et son montant brut ne peut pas dépasser 5 % du Pass de la Sécurité sociale. Pour l’année 2024, cela correspond à un montant annuel de 2 318,40 euros bruts (5% de 46 368 euros bruts) ou encore 193 euros par mois.
Les plafonds du cumul retraite et emploi des indépendants en un coup d’œil :
Nature de l’activité | Revenus de l’activité et des pensions de retraite | Montant annuel en 2024 |
Activité libérale | Plafond annuel de la Sécurité sociale (Pass) | 46 368 euros |
Activité artisanale, industrielle ou commerciale | 50 % du Pass | 23 184 euros |
Activité , industrielle ou commerciale exercée dans une zone de revitalisation rurale (ZRR) ou dans une zone urbaine prioritaire (ZUP) | Pass | 46 368 euros |
Vous devez avertir, par écrit, la Sécurité sociale des indépendants (SSI) le mois suivant votre reprise ou votre poursuite d’activité.
Les indépendants souhaitant reprendre une activité salariée doivent remettre une attestation de cessation d’activité à leur caisse de retraite. Il leur faut ensuite demander à bénéficier d’une situation dérogatoire pour cumuler une pension de retraite avec leurs nouveaux revenus d’activité.
À retenir :
Il est possible de travailler tout en percevant une pension de retraite.
Il existe deux types de cumul emploi-retraite : le cumul intégral (ou déplafonné) permettant de percevoir l’intégralité de sa retraite et de ses revenus d’activité, et le cumul plafonné avec un plafond de revenus limité à la retraite.
Pour bénéficier du cumul intégral, il faut avoir liquidé toutes ses pensions de retraite, atteint l’âge légal de départ à la retraite et bénéficier du taux plein de retraite. Cela permet d’acquérir de nouveaux droits (de base et complémentaire) pour une seconde pension.
En cumul intégral, on peut reprendre une activité chez son ancien employeur sans délai. En cumul plafonné, un délai de carence de 6 mois s’applique sauf changement d’employeur.
Le cumul plafonné limite les revenus d’activité et de retraite à 160% du SMIC annuel ou au dernier salaire d’activité.
Les nouvelles activités professionnelles peuvent générer une seconde pension, limitée à 5 % du plafond annuel de la Sécurité sociale.
Depuis la réforme 2023, le cumul intégral est plus avantageux en permettant de nouveaux droits à la retraite, contrairement au cumul plafonné.
Note bas de page (+ indication de la source) :
(1) « Les retraités et les retraites – édition 2023 », Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, juin 2023.
(2) « Le cumul emploi‑retraite – Déterminants individuels et profils types des cumulants », Insee, Economie et statistique, juillet 2021.
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Rédacteur/Rédactrice:
Didier PERROT
Rédacteur et Expert retraite